La gouvernance des OPCVM au Luxembourg

C’est pourquoi sa lecture est recommandée à quiconque...

Jan Jaap Hazenberg, 11 mai, 2011 | 15:36
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Le 10 mars, la société de conseil et d’expertise comptable PwC et le Comité des Fonds de l’Institut Luxembourgeois des Administrateurs ont publié l’édition 2010/2011 de l’Enquête sur la gouvernance des fonds luxembourgeois (appelée ci-après l’enquête PwC/ILA). Nous menons des recherches dans ce domaine à lLa Luxembourg School of Finance (LSF), et attendions donc avec impatience cette cinquième édition de l’enquête. Celle-ci fournit un excellent éclairage sur les rouages internes des conseils d’administration des fonds luxembourgeois. C’est pourquoi sa lecture est recommandée à quiconque est concerné par la gouvernance des fonds, que ce soit en tant que praticien ou qu’universitaire.

47 fonds ont participé à l’enquête PwC/ILA 2010/2011, dont 31 avaient le statut d’OPCVM et 16 ne l’avaient pas. D’après l’enquête, le conseil d’administration se réunit généralement trois ou quatre fois par an, le plus souvent au Luxembourg. Les conseils d’administration reçoivent une quantité non négligeable de documents. En règle générale, le conseil d’administration d’un OPCVM en reçoit plus de 20, dont les états financiers, des rapports de conformité, des rapports sur les violations des restrictions sur les investissements/comptes-rendus d’erreurs (dans tous les cas) et des rapports sur les réclamations des investisseurs, sans oublier les rapports sur la lutte contre le blanchiment d’argent (AML)/le contrôle préalable de l’identité des clients ainsi que sur les performances des prestataires de services (dans la majorité des cas). La gestion des risques fait l’objet de plus d’attention qu’avant la crise. Alors qu’en 2008 la priorité était au suivi des performances, l’enquête de 2010 montre qu’aujourd’hui ce sont les mécanismes de gestion du risque et son contrôle qui constituent la première préoccupation. L’enquête PwC/ILA met en lumière une marge de progression significative dans la distribution des fonds. Dans ce domaine, les conseils d’administration des fonds sont actuellement assez peu impliqués dans la sélection des distributeurs et le respect des règles contre le blanchiment et sur le contrôle préalable de l’identité des clients, pour lesquels ils se reposent sur le distributeur mondial et l’agent de transferts.

La partie de l’enquête qui touche de plus près à la recherche de la LSF est l’évolution de la composition des conseils d’administration, en particulier la distinction entre les membres qui représentent le promoteur et ceux qui sont indépendants.

L’enquête PwC/ILA inclut les membres du conseil juridique d’un fonds dans les administrateurs indépendants. Elle met en évidence une indépendance accrue des conseils d’administration par rapport aux millésimes précédents. Dans le cas des OPCVM, le pourcentage de conseils d’administration dont au moins un administrateur est indépendant du promoteur a été porté de 55 % en 2006 à 62 % en 2008 et 75 % en 2010. Les administrateurs indépendants sont plus fréquents chez les promoteurs anglo-saxons que chez ceux d’Europe continentale. Parmi les premiers, 85 % comptent au moins un administrateur indépendant, tandis que cette proportion n’est que de 67 % chez les seconds. Le pourcentage moyen d’administrateurs indépendants dans les conseils qui en ont au moins un s’est aussi accru.

L’étude de la LSF sur l’indépendance des conseils d’administration n’est pas fondée sur un questionnaire d’enquête, mais fait appel à un échantillon représentatif des principaux promoteurs transfrontaliers dont la gamme comporte des OPCVM domiciliés au Luxembourg. Les promoteurs de l’échantillon ont été sélectionnés dans le classement annuel des 50 premiers promoteurs de fonds transfrontaliers compilé par PwC. Seuls ont été retenus ceux qui y figuraient au moins une fois entre 2003 et 2010. Au total, l’échantillon se composait de 48 promoteurs, dont chacun n’est représenté que par son OPCVM à compartiments vedette. Cinq de ces fonds ont été lancés pendant la période couverte par l’enquête, tandis que trois fonds à compartiments ont dû être retirés de l’échantillon pour cause de fusion. Le nom de tous les membres du conseil d’administration de ces OPCVM, leur degré d’indépendance et la date de leur nomination et de leur démission sont tirés des rapports annuels des fonds à compartiments publiés entre 2000 et 2010. Les informations manquantes ont été complétées par d’autres sources. Une définition identique de l’indépendance a été retenue pour que les chiffres soient comparables avec ceux de l’enquête PwC/ILA.

Les promoteurs anglo-saxons – et ce constat rejoint les enseignements de l’enquête PwC/ILA – ont plus souvent des administrateurs indépendants que leurs homologues d’Europe continentale et, de plus, la proportion d’administrateurs indépendants dans les conseils qui en comptaient au moins un a augmenté. On constate néanmoins une différence notable en ceci que le pourcentage d’OPCVM dont le conseil compte au moins un administrateur indépendant est plus faible que dans l’enquête PwC/ILA (49 % au lieu de 75 %) et qu’il a diminué entre 2000 et 2009, revenant de 63 % de l’échantillon à 49 %.

D’où vient cet écart ? Les fonds qui ont participé à l’enquête PwC/ILA ont été recrutés chez les clients et contacts de PwC et ILA. Par la force des choses, ceux qui ont répondu à l’enquête sont les fonds qui se soucient le plus de la gouvernance et il n’est donc pas interdit de penser que la probabilité qu’ils aient envisagé et mis en œuvre une structure du conseil d’administration incluant des administrateurs indépendants est plus forte que chez les autres fonds. Il est vraisemblable que l’écart entre les résultats des deux études soit dû à un biais de sélection inhérent à l’enquête PwC/ILA, sur lequel s’est greffée la distorsion provenant des différences de nature entre les participants aux deux enquêtes au fil des ans. Même l’échantillon de la LFR aurait pu afficher une proportion d’administrateurs indépendants supérieure à la moyenne des fonds luxembourgeois puisqu’il est constitué des grands promoteurs internationaux et leurs principaux fonds à compartiments. C’est pourquoi on peut en conclure que le conseil d’administration des OPCVM luxembourgeois est moins indépendant qu’on ne pourrait le croire à la vue de l’enquête PwC/ILA.

 

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- Cette article a été publié dans Luxembourg Fund Review n.16. Pour plus d’informations, veuillez visiter www.ifebenelux.com ou www.alfi.lu

 

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